Le sang du foulard

Le sang du foulard

Feuilleton épisode 8 : Le Templier

 

VIII

Le Templier

 

Au soir de ce samedi, Aigle et Wapiti ayant décidé de revenir passer la nuit au local, les membres de la patrouille, à l’exception des deux enfants de chœur de service le lendemain,  firent aussi un aller-retour de la cote Saint Martin à leurs domiciles, ayant obtenu de leurs familles l’autorisation de dormir sur les lieux. Le lendemain devant être encore une journée de préparation, l’idée d’une nuitée dans le repaire des choucas emballait tout le monde ! C’était aussi l’opportunité de tester l’état « de marche » des matelas pneumatiques de la patrouille, de vieilles couches gonflables « à boudins » ramenées jadis des familles, qui n’en voulaient plus ! S’ils « perdaient », il allait falloir trouver les « failles » et réparer… Cette opération ô combien utile était sur le « plan de vol » arrêté par le CP. Ce fut aussi l’occasion d’un repas improvisé cuisiné dans la grande salle, à la lumière d’une acétylène – pour le plus grand bonheur de Rémi. Bien entendu, Mouche fut le manipulateur émérite de la lampe qui trôna sur la table avec sa flamme jaune campée sur un casque et sa généreuse lumière ouatée. La belle flamme « en V » projetait des ombres amicales sur les murs de la grande salle. Le dîner scout, fait de nouilles à la sauce tomate et de jambon cru, achevé avec des « Vache qui rit » (petites portions de fromage cuit) et des fruits, eut pour Rémi une saveur qui lui était inconnue : celle du goût de l’acétylène et de la terre de grottes – qu’il trouva plaisant !

 

Démunis de la pompe à main que Hibou paisible avait en réparation chez lui, les choucas durent épuiser leurs cages thoraciques pour gonfler les matelas à la bouche – une horreur sans nom ! Naturellement, le sens du jeu des garçons, souvent stimulé par les initiatives du « petit » Mouche, donna naissance à une compétition sans pitié : « à celui qui achèverait le gonflage le premier ». L’ennui – et ce fut l’objet d’un débat et de chamailleries –, est que sur les six matelas, quatre étaient passablement poreux ou fissurés quelque part ! Aigle, qui vivait dans une villa avec jardin et lavoir, s’engagea à tenter la réparation puisqu’un bassin était nécessaire pour détecter les fuites… Rémi proposa de l’assister pour cette « mission ‘pneumatiques’ » ; rendez-vous serait fixé pour la semaine. Ce soir-là, on tira au sort les « sans matelas » ; la bâche  d’un « marabout » de « surplus américain » (vieille tente de l’armée, de grande taille et qui se dresse avec des mats en bois) ferait office de litière pour les deux démunis… D’ailleurs, le parterre en béton froid et poussiéreux justifiait un « tapis de sol » même pour les nantis ! Rémi utilisa à nouveau le sac de couchage que Hibou laissait régulièrement au local. Le « duvet » était aussi sale que peut l’être celui d’un aventurier-spéléologue et tenait « presque debout » grâce à son amidon de crasse ! Mais le jeune citadin, jusque-là plutôt « délicat » question hygiène, savait désormais s’adapter à ces conditions nouvelles ! L’absence de toilettes nécessitait une vidange commune à l’extérieur, côté murs, ou la visite des W.C. publics situés sur la place en haut de la côte.

 

Quand Aigle verrouilla la porte N°12, depuis l’intérieur du mastaba, le novice jeta un dernier coup d’œil sur les reliques « mortuaires » et le crâne de bélier puis il ferma l’interrupteur… Dans le dortoir, un léger clair de lune traversait la petite fenêtre inaccessible et sans volet et faisait ressortir les croix blanches des étendards, gommant par contraste le reste du décor. Une minuscule flamme bleue moribonde s’efforçait de s’éteindre sur le casque du repas, sans savoir qu’elle n’y parviendrait qu’au petit matin – la réaction chimique eau-carbure a la vie dure ! Dans l’obscurité, chacun des choucas totémisés y alla de ses bavardages anecdotiques pour épater le cul de pat’. Rémi répondit à quelques questions, en posa quelques autres puis un silence de sépulcre tomba sur le nid. Le novice regarda un instant les étendards emblématiques qui lui donnaient l’impression de coucher dans la salle d’un château, chevalier parmi les chevaliers, Templier parmi les Templiers ! Puis il pensa au mystérieux « inconnu de l’Ardèche », dont les fragments dormaient à-côté…  

 

Les rêves du novice furent riches en drôles d’aventures où il se vit accompagné de la troupe au complet…

 

A suivre...



10/02/2015
0 Poster un commentaire

A découvrir aussi


Ces blogs de Nature pourraient vous intéresser

Inscrivez-vous au site

Soyez prévenu par email des prochaines mises à jour

Rejoignez les 73 autres membres